Nous agissons pour la défense et l’amélioration du droit des victimes de terrorisme en fonction des difficultés dont elles nous informent.
Une des spécificités de l’attentat de Nice est qu’il s’est produit dans un lieu public ouvert. Apporter la preuve de sa présence dans la “zone de danger” (telle que définie par le FGTI) au moment du drame n’est pas facile, d’autant plus que les enregistrements des caméras de vidéo-surveillance ont été placés sous scellés, les rendant inaccessibles. Nous approuvons la vigilance des autorités à dissuader les “fausses victimes” puisque les faits nous ont révélé que des personnes sans scrupules tentent de profiter de ce drame. Mais il est également important qu’aucune victime ne soit laissée pour compte et puisse faire valoir ses droits. Le temps de la reconnaissance peut parfois être très long car les démarches sont éprouvantes. En 2020, 17 nouvelles victimes ont été enregistrées auprès de l’EIA de Nice. Les plaintes sont aujourd’hui encore recevables auprès de la caserne Auvare de Nice.
La constitution de partie civile est un acte fondateur. Elle vous permet d’avoir accès aux pièces du dossiers d'instruction, d’adresser des questions aux juges, d’être auditionné afin d’apporter votre témoignage de victime directe, de demander une expertise, d’assister au procès, etc.
Le droit français vous permet de vous constituer partie civile avec ou sans avocat. Promenade des Anges peut vous renseigner sur les démarches à effectuer.
Cette instruction s'intéresse aux complicités dont a bénéficié le terroriste (soutien, fourniture d’armes…).
Dès juillet 2016, la cellule de crise de la section antiterroriste du parquet de Paris est activée. Une enquête judiciaire est ouverte pour assassinats et tentatives d'assassinats en bande organisée en lien avec une entreprise terroriste, tentatives d'assassinat sur personnes dépositaires de l'autorité publique et association de malfaiteurs terroristes en vue de préparer des crimes d'atteintes aux personnes.
Le 21 juillet, cinq personnes suspectées de complicité sont déférées au palais de justice et placées en détention provisoire.
L’enquête conduira à la mise en examen de neuf personnes avant la fin 2016. Quatre d’entre elles sont libérées et placées sous contrôle judiciaire entre 2017 et 2019. Une autre se suicide en prison en juin 2018.
Deux réunions de parties civiles sont organisées par les juges à l’été 2017, à Nice et Paris, et deux autres sont tenues en novembre 2018.
Le 30 avril 2020, l’Instruction annonce la clôture de l’enquête. Le 23 juin, le parquet national antiterroriste demande un procès aux Assises pour les neuf prévenus.
Cette enquête judiciaire doit déterminer si la mairie et l’État ont bien anticipé les risques d’attentat, s’ils ont bien mis tous les moyens en œuvre pour assurer la meilleure sécurité et parer aux menaces le soir de la “Prom’ Party” (grande soirée musicale festive organisée par la Ville de Nice sur la Promenade des Anglais le 14 juillet 2016).
Comment, malgré les 1800 caméras de surveillance de la ville, malgré l’interdiction aux véhicules de plus de 3,5 tonnes de circuler sur la Promenade, le chauffeur a-t-il pu passer inaperçu lors des 11 repérages qu’il a effectués avec son camion de 19 tonnes, entre le 11 et le 13 juillet, ainsi que le soir du 14 juillet ?
En juin 2019, plusieurs coprésidents de Promenade des Anges ont été conviés au Conseil de l’Europe à Strasbourg pour participer à un atelier sur la protection des victimes d’actes terroristes. Cet atelier était organisé par le Comité directeur pour les droits de l’homme (CDDH) sous l’égide de la Présidence française du Comité des ministres.
Extrait de notre intervention auprès de Mme Pelsez, Déléguée Interministérielle à l’Aide aux Victimes, lors de cet atelier:
“Près de 3 ans après la tragédie de Nice qui a coûté la vie à 86 personnes, fait 450 blessés physiques et traumatisé des milliers, les familles des défunts n’ont pour la plupart toujours pas été informées de ce que des organes ont été prélevés sur leur défunt, que ces organes sont encore aujourd’hui conservés à l’institut médico-légal. Ces défunts qui ont subi une procédure d’autopsie judiciaire ont été inhumés sans leurs organes, et sans que les familles aient eu connaissance de ces prélèvements.
Ces familles victimes d’un acte de terrorisme et l’association Promenade des Anges dont nous sommes les représentants dénoncent ces prélèvements d’organes et nous tenons à vous exprimer le point de vue des familles qui vivent cela comme des actes qui portent atteinte à l’intégrité du cadavre et donc du défunt, c’est-à-dire l’intégrité des victimes de terrorisme.
Comment peut-on considérer que son enfant, son conjoint repose en paix tandis que son cœur, son cerveau et une dizaine d’organes sont aujourd’hui encore conservés sous scellés à l’institut médico-légal ?
Nos questions sont les suivantes :
1- Est-ce que ces prélèvements d’organes entiers et leur conservation sous scellés sont nécessaires sachant qu’à Nice l’acte terroriste a été filmé par les caméras de vidéo-surveillance de la ville ?
2- Est-ce que les autres pays européens appliquent la même procédure d’autopsie judiciaire, avec ces mêmes prélèvements ?
3- L’article 1er de la Constitution française stipule que la République française respecte toutes les croyances (et malheureusement la non-restitution des organes prélevés avant inhumation constitue pour les familles des victimes décédées une profanation de leurs rites funéraires et de leurs croyances); de quelle façon l’article 1er de la Constitution et le respect des droits de l’homme, et donc des victimes décédées, sont-ils compatibles avec la procédure post-mortem telle qu’elle existe aujourd’hui en France ?”
Depuis sa création en août 2017, la délégation interministérielle à l’aide aux victimes s’est efforcée d’améliorer les dispositifs de prise en charge des victimes, en prenant en compte les retours d’expérience issus du très grand nombre d'événements dramatiques, pour lesquels elle s’est mobilisée.
La DIAV a effectué un énorme travail et a su être à l’écoute des associations de victimes pour que, collectivement les pratiques s’améliorent, que les cadres d’intervention se précisent, pour que la parole des victimes soit entendue.
Plusieurs groupes de travail ont été mis en place au cours des années 2018 et 2019. En octobre 2019, la Déléguée Interministérielle Mme Pelsez a rendu son rapport pour améliorer la prise en charge des victimes.
La contribution de Promenade des Anges a notamment abouti à la proposition suivante:
Sous réserve des nécessités de l’enquête, les proches du défunt sont informés dans les meilleurs délais lorsqu’une autopsie a été ordonnée (art. 230-28 du code de procédure pénale (CPP)). Le praticien ayant procédé à l’autopsie judiciaire « est tenu de s’assurer de la meilleure restauration possible du corps avant sa remise aux proches du défunt. Il ne peut être refusé aux proches du défunt qui le souhaitent d’avoir accès au corps avant sa mise en bière, sauf pour des raisons de santé publique. L’accès au corps se déroule dans des conditions qui leur garantissent respect, dignité, décence et humanité. Une voie réglementaire, informe les familles de leurs droits et devoirs. Elle est obligatoirement affichée en un lieu visible” (art.230-29 du CPP).
Les textes réglementaires évoqués dans ces dispositions issues d’une loi de 2011 (Loi n°2011-525 du 17 mai 2011, article 147), notamment la charte de bonnes pratiques, n’ont pas encore été pris à ce jour.
C’est également le cas pour les dispositions spécifiques relatives à la restitution des organes prélevés lors des autopsies judiciaires (art. 230-30 du CPP) dont le problème a été récemment soulevé par des familles après l’attentat de Nice. Dans le cadre de la rédaction du présent rapport, la DIAV a relancé les échanges entre le ministère de la Justice et le ministère des Solidarités et de la Santé. Ces textes doivent être adoptés dans les meilleurs délais afin de préciser les modalités d’information des proches d’un défunt à l’égard duquel une autopsie judiciaire a été réalisée (notamment si des prélèvements d’organes ont été effectués), déterminer les modalités d’accès et de remise du corps du défunt et enfin évoquer la possibilité pour les proches de bénéficier d’un accompagnement psychologique.
Proposition 11 :
Pour le Ministère de la justice, en lien avec le ministère des Solidarités et de la Santé, veiller à l’adoption rapide des textes réglementaires d’application des articles 230-29 et 230-30 du code de procédure pénale relatifs aux autopsies judiciaires.
Les parcours indemnitaires de la plupart des victimes se révèlent compliqués. Auprès du Fonds de garantie (FGTI) comme des médecins chargés des missions d’expertise, de nombreux dysfonctionnements nous ont été rapportés.
En juin 2018, nous avons invité Mme Françoise RUDETZKI, fondatrice et siégeant au fond de garantie, à rencontrer nos membres pour les conseiller et répondre à leurs questions. Ce temps d’échange était également celui d’une prise de conscience par Mme Rudetzki des difficultés multiples auxquelles les victimes doivent faire face tandis qu’elles restent en état de fragilité important dû aux différents traumatismes subis.
Nous nous sommes engagés contre le projet de loi de création d’un juge unique de l’indemnisation des victimes d’acte de terrorisme (JIVAT), à notre sens recul majeur du droit des victimes d’attentat (suppression du droit de proximité, du droit d'être indemnisé par un juge pénal et du secret professionnel à l'encontre des victimes d'attentat).
Afin de répondre au mieux aux besoins des victimes, nous effectuons des sondages en ligne. À l’automne 2019, nous avons ainsi reçu une centaine de réponses au sondage “FGTI”. Nous souhaitions en présenter la synthèse à la direction du Fonds de garantie.
Absente lors du dernier Comité Local d’Aide aux Victimes en décembre 2019, nous espérons pouvoir rencontrer très prochainement la direction du FGTI lors du prochain CLAV. Il est essentiel de porter à sa connaissance les dysfonctionnements lors des expertises psychiatriques des enfants ou des adultes, ou encore le manque de reconnaissance du préjudice professionnel.
Le retour à l’emploi est un enjeu majeur du parcours de résilience des victimes. Les victimes de terrorisme sont aujourd’hui reconnues victimes civiles de guerre. À ce titre, elles peuvent prétendre à des emplois réservés dans la fonction publique d’État ou la fonction publique territoriale. L’ONAC-VG est l’organisme d'état qui les accompagne dans ces démarches.
Promenade des Anges est à vos côtés pour vous aider à faire valoir vos droits à la réparation de préjudice ainsi qu’au retour à l’emploi.